Connaissance du Viet-nam By Pierre Huard, Maurice M. Durand (1954)

Le jeu des 36 bêtes ou des 36 caractères (đánh đổ chữ) [loterie en caractères], a tenu une place énorme dans la vie des Vietnamiens. Deux établissements autorisés lui étaient réservés à Hanoi et il existait, rue du Coton, un arbre sacré auquel les joueurs venaient demander de leur donner chance. On distribuait gratuitement aux joueurs une feuille destinée à développer leur imagination et à leur donner des idées. On inscrivait sur autant de feuilles qu'on le désirait le caractère choisi. Cette feuille était déposée avec l'argent délivrait un reçu. Le caractère ou l'animal gagnant choisi par le croupier était déposé dans une enveloppe de toile et était hissé au plafond. A l'heure du tirage, elle était descendue et ouverte en public.

L'Indochine Moderne By Eugene Teston et Maurice Percheron (1931)

Le jeu des trente-six bêtes est un jeu d'intellectuel, pas son essence même, mais il devient, de plus en plus, d'une morosité inouïe de par sa vulgarisation, car les joueurs ne voient point le jeu qui n'est qu'une sorte de loterie.

Actuellement, le jeu des trente-six bêtes est le plus populaire. Tout le monde peut y jouer, riches ou pauvres; toute mise est acceptée. Et le gain se determine par un pourcentage énorme de 3000 pour cent, c'est à dire trente fois la mise, le tenancier ne se réservant que six chances.

Les 36 bêtes sont réparties de la façon suivante:

Quatre lettrés : poisson blanc, limaçon, oie, paon, correspondant aux nos 1, 2, 3, 4;

Cinq mandarins militaires : ver, tigre, cochon, lapin, buffle, correspondant aux nos 5, 6, 7, 8, 9;

Sept commerçants : dragon volant, chien, cheval, éléphant, chat sauvage, rat, abeille, avec les nos 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16;

Deux sorciers : grue et chat domestique, avec les nos 17 et 18;

Quatre princesses : papillon, pierre, hirondelle, pigeon, avec les nos 19, 20, 21 et 22;

Quatre philosophes : singe, grenouille, épervier, dragon couchant, correspondant aux nos 23, 24, 25 et 26;

Quatre bonzes : tortue, coq, anguille, poisson noir, correspondant aux nos 27, 28, 29 et 30;

Cinq mendiants : crevette, serpent, araignée, daim, chèvre, avec les nos 31, 32, 33, 34 et 35;

Une bà dòng : avec le no 36.

Chaque personnage correspond à un nom d'animal. Cette disposition a été prévue afin de développer les tendances superstitieuses du joueur : par exemple, si l'on rencontre pendant la journée un mendiant ou un bonze, on aurait des chances de gagner en jouant sur les animaux correspondant à ces personnages.

Le tirage de ce jeu se fait de la façon suivante : une personne de confiance qui doit garder un mutisme, une discrétion absolue, met dans une enveloppe un bout de papier sur lequel est inscrit un nom de la bête. Et le soir, après que les rabatteurs ont fait leur tournée habituelle - car ici, les joueurs restent chacun chez eux, ce sont les rabatteurs que les rejoignent et leur apportent leur gain ou, le plus souvent, la nouvelle de leur guigne - le tirage se fait par l'intermédiaire d'un thây đê qui ouvre l'enveloppe, fermée le matin dès la première heure.

le Jeu en Cochinchine By Georges Durrwell
(Bulletin de la Société des études indochinoises de Saïgon Année 1901 1er Semestre)

Le jeu des trente-six bêtes, qu'une mesure de proscription a frappé le 15 Octobre 1888, à la suite d'une interpellation développée à la Chambre des députés, dans ses séances des 17 et 18 Juillet n'est, en realité, qu'une véritable loterie qui florissait jadis dans les états du roi Norodom.

Nous ne saurions mieux faire que d'emprunter aux remarquables conclusions présentées au Conseil d'Etat par M. le Commissaire du gouvernement Lavavasseur de Précourt la description tres précise qu'il a donnée de ce jeu.

Le jeu des trente-six bêtes est une sorte de loterie dont le tirage a lieu chaque jour. Les numéros sont remplacés par des figures, et quelque fois même par des extraits de fourrures ou de plumes de trente-six bêtes, dont la nomenclature est toujours la même, depuis l'éléphant jusqu'au papillon : chaque numéro correspond, en outre, au nom d'un mandarin, bonze, lettré ou personnage célèbre.

Chaque jour, avant l'ouverture des jeux, le numéro ou animal gagnant est choisi par un employé; son portrait, plus ou moins grossièrement fait, est enfermé dans une boîte ou dans un panier juché au bout d'un mât et qu'on ouvre à la fin de la journée.

Les gagnants reçoivent trente fois leur mise. Le jeu peut prêter à la fraude, le gagnant étant connu à l'avance du maître du jeu. Mais, même en dehors de toute fraude, le banquier est très favorisé, puisque, ne payant que trente fois la mise aux joueurs heureux, il se réserve ainsi six chances; le jeu est donc une sorte de roulette, dans laquelle il y aurait six zéros réservés exclusivement au banquier.

Ce jeu, dans lequel les chances de gain sont ainsi subordonnées au pur hasard, est origniaire de la Chine où les lettrés seuls peuvent le pratiquer avec des combinaisons qui lui donnent un caractère tout different. L'un d'entre eux est chargé, sous le nom de thay de, de diriger la partie et de choisir l'animal gagnant: il doit le faire dans le plus scrupuleux secret, sous peine d'être expulsé de la corporation. Il inscrit, à cet effet, le caractère représentant le nom d'une des trente-six bêtes sur un menu feuillet qu'il introduit dans une enveloppe hermétiquement close placée en face des joueurs. Puis il fait passer sous leurs yeux une phrase composée de dix caractères, extraite d'une fable, d'un proverbe ou d'une anecdote dans lesquels il est fait allusion, d'une façon quelconque, à l'animal dont il s'agit de deviner le nom. Celui dont l'esprit subtil parvient à déchiffrer cette enigme, véritable casse-tête chinois, est proclamé gagnant et reçoit trente-fois sa mise, à la charge toutefois d'en remettre un cinquième au banquier pour alimenter la cagnotte de la Société. Voici, au surplus, un exemple choisi entre mille :

Le caractère à deviner est celui qui sert à designer le singe ou tam-hoc ; le thây đế peut alors soumettre aux joueurs la phrase suivante:

Bất khákhinhquan tuc
ne pasmépriserphilosophie
Ai taituco ngoi
Aimer biensecorriger soi-même

Elle est extraite, en effet, d'une fable populaire dans laquelle sont racontées les mésaventures posthumes d'un vieux mandarin avare que les divinités infernales métamorphosent en singe en expiation de sa ladrerie.

Ce genre d'exercice ne trouverait, nous en sommes convaincu, que fort peu d'amateurs parmi nos adeptes européens de la dame de pique, de la roulette ou du trente et quarante

Voici à titre de curiosité la nomenclature des 36 bêtes (ou assimilées) qui servent aux combinaisons de cette loterie :

Nom* Animal* En caractères En langue vulgaire
逢春孔雀1Phòng Xuâncon côngpaon
志高蚯蚓2Chí Caocon trùnver de terre
萬金大蛇3Vạn Kimcon rắnserpent
合同白鴿4Hiệp Dongchim bồ câupigeon
月宝白免5Nguyệt Bửucon thỏlièvre
合海蛤乸6Hiệp Hảicon ếchgrenouille
安士狐俚7An Sĩbà vãibonzesse
漢雲水牛8Hờn Vâncon trâubuffle
必得老鼠9Tấc Đắccon chuộtrat
占魁白魚10Chiếm Khôicon cá trắngpoisson blanc
井利金鱼11Tỉnh Lợican cá đenpoisson noir
艮玉蝴蝶12Tấn Ngọccon bướmpapillon
坤山老虎13Khôn Sơncon cọptigre
上招白燕14Thượng Chiêucon énhirondelle
天申師猫15Thiên Thâncon mèo nhàchat domestique
只得野猫16Chỉ Đắccon mèo rừngchat sauvage
福孫白狗17Phước Tôncon chóchien
有利大象18Hữu Lợicon voiéléphant
元吉大鹿19Nguơn Kiếtcon naicerf
吉品翠羊20Kiết Phẩmcon dêchèvre
光明白马21Quan Minhcon ngựacheval
明珠百足22Minh Châucon đárocher
火官大黿23Hoả Quancon quitortue
九官麻鹰24Cửu Quancon chim ưngperroquet
扳桂田螺25Bản Quếcon ốcescargot
三槐猴子26Tam Hộccon khỉsinge
天良黄鳝27Thiên Lươngcon lươnanguille
太平真龍28Thái Bìnhcon rồng nằmdragon couché
江祠龍船29Giang Tửcon rồng baydragon volant
茂林蜜蜂30Mậu Lâmcon ongabeille
正順大豬31Chánh Thuậncon heocochon
荣生白鵝32Vinh Sanhcon ngỗngoie
青元蜘蛛33Thanh Ngươncon nhệnaraignée
青雲白鶴34Thanh Vâncon hạchéron
元貴蝦公35Nguơn Quờicon tômcrevette
日山山雞36Nhút Sơncon gàcoq

*Ma correspondance en chinois

Nouvelles et informations
Annales de l'Extrême Orient et de l'Afrique n° 125, 11° année, 1/11/1888 link

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Ce jeu, qui a déjà fait tant de bruit au Tonkin, n'est pas le seul qui soit en honneur dans ces pays.

La premiere année de l'adjudication de la ferme des jeux, les jeu des trente-six bêtes avait été prohibé; mais l'année suivante il fut autorisé afin d'obtenir une plus forte redevance de l'adjudicataire sur laquelle on comptait pour aider à équilibrer le budget de 1888.

Beaucoup de personnes, discutant sur l'institution de la ferme des jeux, qui n'existait pas avant notre arrivée, et sur les effets funestes qu'elle produisait, commencèrent une campagne contre le jeu des trente-six bêtes qui fut interdit de nouveau, puis retabli à la suite d'un procès gagné par le fermier.

Ce jeu, appelé aussi des trente-six caractères, et qui n'est qu'une loterie, n'est pas connu.

Voici quelques détails sur son fonctionnement :

Au siège de l'établissement, on delivre gratuitement une feuille imprimée dont voici le modèle:

Buffle Nom de cinq mandarins militaires Dragon Nom de quatre philosophes Coq Nom de quatre bonzes Papillon Nom de quatre princesses
Tigre Oie Tortue Cent-pieds
Porc Huitre Anguille Pigeon
Lapin Singe Carpe Poisson
Ver Au centre, un personnage grossièrement dessiné ayant, inscrits sur tous les membres, les 36 caractères indiqués au tableau.
RenardNom d'une nonesse
ChatNom de deux sorciers
Grue
Cent-piedsNom de cinq mendiants
Daim Eléphant Nom de quatre commerçantsRat Nom de trois commerçants Paon Nom de quatre lettrés du roi
Araignée Chien blanc Canard
Serpent Chat sauvage Jonque Limaçon
Crevette Abeille Cheval blanc Mollusque

Chaque nom de personnage correspond au nom d'un animal; cet assemblage est fait dans le but de déployer l'imagination des joueurs et de leur donner des idées.

Si, dans la journée, on rencontre un bonze, un mandarin, un mendiant, un lettré, etc... on a des chances de gagner, dit-on, si l'on joue sur les animaux correspondant à ces personnages.

Le jeu des trente-six bêtes tient une place énorme dans la vie annamite; depuis le mendiant qui sollicite quelques sapèques des passants jusqu'au mandarin, tous jouent; l'entrée de la maison de jeu est interdite aux femmes, aux enfants et aux soldats, mais ceux-ci éludent cette défense en envoyant chercher des billets.

Sur les billets, en tête de chaque colonne, figurent les caractères ou noms d'animaux.

On ne peut jouer que deux francs sur une feuille, mais on peut ponter sur autant de feuilles que l'on veut. Dans une colonne reservée à cet effet, on indique le total des mises. On rapporte ces feuilles à la maison de jeu qui les inscrit, encaisse l'argent et delivre un reçu indiquant le caractère choisi et la somme versée.

Il est fait deux tirages par jour; le premier à midi et le second à cinq heures du soir.

Le caractère ou animal gagnant est choisi par un employé de la maison qui remplit l'office de croupier; sa discrétion est, paraît-il, à toute épreuve. Au commencement de chaque émission de billets, le caractère choisi est enfermé dans une enveloppe de calicot et hissé au plafond. L'heure du tirage arrivée, l'enveloppe est descendue et ouverte par qui veut.

A ce moment, la voie publique est envahie par la foule qui se presse et se bouscule, attendant avec des trépignements d'impatience que le sort ait parlé.

Aussitôt le chiffre connu, les gagnants se précipitent pour encaisser leur gain pendant que les perdants rentrent chez eux pour aviser aux moyens de recommencer une nouvelle partie.

Le banquier, se réservant six chances, ne paie que trente fois la mise.

Il existe, à Hanoï, deux maisons importantes exploitant le jeu des trente-six bêtes, les patrons payent au fermier general, responsable de toutes les maisons qu'il n'exploite pas lui-même, un droit de quarant-huit à cinquante piastres par jour, soit environ 300 francs. Le fermier des jeux se contente génèralement de délivrer des licences à certaines époques; le total des droits payés par les entrepreneurs à la ferme, pour les maisons ouvertes dans la province de Hanoï, est de trois cents piastres par jour.

En tenant compte du gain que les sous-fermiers peuvent réaliser, on se rend compte de l'énorme impôt prélevé par la passion du jeu sur la bourse des Annamites.

A côté de ces établissements autorisés il existe des maisons clandestines également très fréquentées et dans lesquelles on joue d'autres jeux; aux carrefours, on trouve même des jeux en plein vent, dans le genre du bonneteau.

Les maisons du jeu des trente-six caractères délivrent, tous les soirs, des papiers sur lesquels sont imprimés deux vers ou deux dictons chinois; le premier doit aider à jouer le matin et l'autre le soir. Ils ne donnent aucun renseignement, mais sont destinés à inspirer des idées au joueur embarassé du choix.

Dans ce pays de chimères, où la superstition joue un grand rôle, où les histoires de dragons et de génies laissent loin derrière elles tous nos contes de fées et de revenants, que de croyances bizarres les joueurs n'ont-ils pas!

En Europe, la possession de certains objets, la rencontre de tel personnage, passent pour porter veine au jeu; ces superstitions sont bien anodines si on les compare à la croyance aveugle des Annamites dans l'influence des génies, par exemple; aussi les maisons de jeux ont-elles déjà essayé plusieurs fois de détruire la retraite des bons génies domiciliés à Hanoï.

Un des lieux affectionnés par les bons génies se trouve rue du Coton, dans un arbre devenu sacré et qui est l'objet d'une grande vénération.

Tous les jours, on peut voir les joueurs de Hanoï ou des environs faire leur dévotions à ce but de pélerinage.

Ils s'inclinent plusieurs fois en faisant des Lay (saluts) et jettent deux sapèques dans un plat; si l'une tombe pile et l'autre face, le joueur sera favorisé du sort. D'autres emportent des feuilles de cet arbre ou des baguettes d'encens qui ont brulé devant l'autel dressé à son pied: ils couchent à côté de ces fétiches pendant la nuit et si, dans leurs rêves, ils voient apparaître un des animaux de la feuille de loterie, ils peuvent jouer à coup sûr sur cette figure.

Les heureux ne manquent jamais de venir manifester leur reconnaissance en apportant à la gardienne de ce lieu sacré une offrande en argent pour aider plus tard à la construction d'une pagode en l'honneur des bons génies protecteurs des jeux.

La decouverte de ce lieu miraculeux ne date que de peu de temps.

Terminons en disant que l'institution des jeux a été une bien mauvaise inspiration. L'exploitation des vices d'un peuple, mis en quelque sorte en tutelle, répugne au caractère français; elle est immorale au premier chef, en nous ne comprenons pas que l'odieux fermage des jeux trouve des défenseurs jusqu'au sein du Parlement. Pour une redevance de 215.000 piastres par an, nous avons appauvri le pays à nos dépens et au bénéfice des Chinois qui, seuls, profitent de cette exploitation.

Dans aucun pays du monde, la passion du jeu n'est aussi forte que chez les Annamites; il faut la combattre et non la réglementer. On ne réglemente pas les mauvaises passions; les tolérer et les autoriser pour en tirer parti, c'est s'en rendre complices.

Nous ne citerons qu'un exemple pour faire comprendre les effets de la tentation des maisons de jeu. A l'époque de la rentrée de l'impôt, nos résidents, dans les provinces, sont obligés de faire surveiller et garder à vue les maires et les chefs de canton chargés de le recueillir pour ne pas qu'ils aillent le porter à la maison de jeu. Et tous les voyaguers savent que l'Annamite joue tant qu'il a de l'argent; lorsqu'il n'a plus le sou, il vend son terrain, sa maison, sa femme, ses enfants, et jusqu'à ses vêtements; lorsqu'il meurt de faim, il se fait voleur et pirate.

La ferme des jeux est une véritable prime à la piraterie.

Études, observations, impressions et souvenirs: Le Tonkin français contemporain
By Edmond Courtois (1891)

pages 341 - 343.

Mais le plus désastreux pour les Annamites est le fameux jeu des 36 bêtes,si célèbre chez les Français et si peu connu d'eux. Voici en quoi il consiste :

On délivre au joueur, dans les maisons de jeu autorisées, une sorte de feuille imprimée dont voici un modèle exact :

On fait ainsi deux tirages par jour en général : un vers midi, l'autre vers 5 heures.
Le banquier se réserve six chances pour lui, ce qui fait qu'il ne paye que trente fois la mise. Dès que le chiffre gagnant est sorti, les joueurs sont payés séance tenante.

Une foule de superstitions se mêlent à ces jeux ; c'est ainsi que si l'on rencontre, par exemple, dans la journée, un mandarin ou un lettré, on a des chances pour gagner si l'on joue sur les animaux qui correspondent à ces personnages. Ce jeu des 36 bêtes est une des plaies du Tonkin, comme de toute l'Indo-Chine. Mandarins, lettrés, commerçants, mendiants, tout le monde joue.

On avait d'abord interdit ce jeu aux femmes, aux enfants et aux militaires, mais cela n'a servi de rien, parce qu'ils se faisaient prendre des billets par d'autres. Les fermiers de ces maisons de jeu paient des droits énormes, et seulement pour Hanoï, ces droits s'élèvent jusqu'à 300 piastres par jour (soit plus de 1200 francs). Mais, à côté de ces fermes de jeu, les maisons clandestines pullulent, et l'on y joue à outrance.

Lorsque les Français sont arrivés en Cochinchine, le jeu existait comme aujourd'hui. Nous avons cherché à le réglementer en le frappant de droits très élevés, et finalement on les a prohibés, quoiqu'ils rapportassent de beaux bénéfices au Trésor public. M. Paul Bert, alors qu'il était résident général en Annam et au Tonkin, avait mis en adjudication le monopole de la ferme des jeux pour chaque province du Tonkin. Le succès dépassa toutes les prévisions. La ferme adjugée pour un an donna, pour Hanoï 180000 francs, pour Haïphong 140000 francs, pour Nam-Dinh 100000 francs, pour Bac-Ninh 60000 et pour Haï-Dzuong 45000 francs; en tout 590000 francs, sans compter les licences que le fermier était tenu de prendre pour chaque maison de jeu, et qui rapportaient au Trésor encore plus de 100000 francs par an.